2016/09/08 Accueil Éducation et conseils
La grossesse et l’accouchement occasionnent beaucoup de changements au niveau du corps de la femme, en particulier au niveau du périnée. Il est très fréquent, après un accouchement, de présenter des signes d’incontinence urinaire. Heureusement, dans la plupart des cas, les fuites urinaires diminuent graduellement en fréquence suite à la récupération 1-2-3. Cependant, l’incontinence peut parfois persister ou encore resurgir plus tard au cours de la vie, notamment à la ménopause. C’est la raison pour laquelle l’évaluation et le traitement en rééducation périnéale par un(e) physiothérapeute qualifié(e) s’avèrent une avenue prometteuse.
On estime qu’environ une femme sur trois présentera de l’incontinence urinaire dans les trois mois suivant l’accouchement 1. Le fait d’avoir présenté des fuites urinaires avant et pendant la grossesse augmente évidemment le risque d’en avoir en post-partum 2-3, d’où l’importance de porter une attention particulière à la musculature du plancher pelvien après l’accouchement et, idéalement même, pendant la grossesse.
Lors de l’accouchement par voie vaginale, mais aussi lors des contractions et des poussées, les muscles du périnée subissent une grande pression et un étirement important. D’ailleurs, selon une étude 4, l’accouchement par césarienne d’urgence (c’est-à-dire lorsque la césarienne n’était pas prévue à l’avance) peut aussi mener à une incontinence urinaire post-partum, probablement à cause de la pression occasionnée sur le plancher pelvien et sur tous les organes du bassin. De plus, le fait que des points de suture au niveau du périnée aient été nécessaires serait un facteur de risque important pour l’incontinence urinaire 3.
Il existe plusieurs types d’incontinence urinaire : à l’effort (ou de stress), par impériosité (ou d’urgence, souvent combinée à une vessie hyperactive), par regorgement (ou par trop-plein), fonctionnelle, et totale (voir le site www.canadiancontinence.ca/fr pour la description de chacun1). Il existe aussi l’incontinence urinaire mixte, lorsque deux types d’incontinence sont combinés. La forme la plus fréquente après avoir accouché (et chez la femme en général) est l’incontinence urinaire à l’effort 1. Celle-ci est causée par une incapacité à maintenir la fermeture normale du sphincter de l’urètre (le conduit reliant la vessie à l’extérieur du corps) en réponse à une augmentation de la pression dans l’abdomen. Il y a donc des fuites lors d’un effort, tel soulever une charge, éternuer, tousser, rire, etc. Pour contrer cette pression, les muscles du périnée doivent être forts et coordonnés, et s’ils ont été affaiblis, il existe des exercices pour les renforcer : les exercices de Kegel. Il s’agit de contracter les muscles du périnée comme si on voulait retenir l’urine, une selle ou un gaz.
Le plancher pelvien est composé de plusieurs muscles ayant pour rôle de supporter la vessie, l’utérus et le rectum. Il est possible, après un traumatisme comme l’accouchement, que l’un ou plusieurs de ces organes se positionnent plus bas dans le bassin. Ce phénomène est appelé prolapsus ou descente d’organe et peut aussi occasionner de l’incontinence urinaire. Dépendamment du grade de l’atteinte, la situation peut s’améliorer avec les exercices de Kegel.
En France, les séances de rééducation périnéale sont prescrites d’emblée après un accouchement et sont défrayées par l’État. Au Québec, l’approche est de plus en plus reconnue et recommandée, mais la référence en physiothérapie n’est pas encore systématique. On recommande une première visite 6 semaines post-partum, suite au rendez-vous de suivi avec le médecin, qu’il y ait présence de fuites urinaires ou à titre préventif.
Pour être efficaces, les exercices de renforcement du périnée doivent être faits régulièrement et ce, pendant plusieurs semaines. De 40 % à 75 % des femmes qui les pratiquent remarquent une amélioration de leur contrôle urinaire5-6.
Une étude a démontré qu’une femme sur deux ne fait pas ses exercices de Kegel correctement si elle ne reçoit que de simples consignes verbales ou écrites 7. Dans cette même étude, on notait qu’une femme sur quatre effectuait une technique pouvant potentiellement causer de l’incontinence. Il est donc important d’évaluer si la contraction est faite correctement à l’aide de la palpation.
Lors d’un traitement en rééducation périnéale, le physiothérapeute commence d’abord par un questionnaire évaluant globalement la fonction urinaire ainsi qu’un examen physique pour établir le plan de traitement. Des exercices sont alors enseignés et l’on détermine la fréquence des traitements de suivi, au besoin.
Outre les exercices de renforcement, certaines techniques peuvent être utiles pour retrouver la sensibilité profonde (ou proprioception) nécessaire à la coordination adéquate des fibres musculaires du plancher pelvien. D’autres techniques seront employées pour détendre certaines tensions musculaires, s’il y en a, ou assouplir la ou les cicatrices éventuelles.
Certains appareils peuvent également être utilisés pour favoriser le renforcement, notamment le dispositif de biofeedback. Celui-ci permet à la patiente de visualiser l’ampleur de la contraction du plancher pelvien à l’aide d’un graphique, de chiffres, ou encore d’entendre un signal sonore lorsque la force voulue est atteinte. Elle peut être très utile pour les femmes qui ne ressentent pas très bien les efforts qu’elles produisent au périnée.
Si la force et la coordination ne sont toujours pas optimales de 3 à 6 mois après l’accouchement, il est possible d’utiliser la stimulation électrique pour « réveiller » ou activer les muscles du périnée. Le courant électrique, émis par une sonde intra-vaginale, occasionnera alors une contraction de ces muscles, à laquelle on combine un effort volontaire pour de meilleurs résultats.
Lorsqu’on sait que notre contraction est adéquate, on peut, dans les jours suivant l’accouchement, débuter les exercices de Kegel. On contracte 5 secondes (sans bloquer la respiration ni serrer les fesses), puis on relâche 10 secondes. On répète 5 à 10 fois, trois fois par jour. Si un rendez-vous en physiothérapie périnéale avait été pris avant ou pendant la grossesse, il est plus facile de savoir si notre technique est adéquate. Par la suite, on peut augmenter la durée des contractions. Lorsqu’on devient à l’aise avec les exercices, il est avantageux d’activer le plancher pelvien lorsqu’on soulève le bébé, qu’on marche ou juste avant de tousser ou d’éternuer. Chaque contraction contribue à augmenter la force et l’endurance de notre périnée.
Mis à part le renforcement des muscles du plancher pelvien, plusieurs actions peuvent aider à réduire l’incontinence urinaire :
De nos jours, les nouvelles mamans sont de plus en plus actives et souhaitent reprendre le sport le plus rapidement possible. Il est important, par contre, de ne pas reprendre les sports à risques prématurément. Par sports à risques, on entend les activités impliquant des sauts, des impacts ou des soulèvements de charges. En réalité, c’est une augmentation trop importante de la pression à l’intérieur de l’abdomen, et donc sur la vessie et le plancher pelvien, que l’on doit éviter. Bien que chaque femme soit différente, on conseille en général d’attendre de 3 à 4 mois après l’accouchement pour reprendre ces sports de façon douce et graduelle. Un bon indicateur que le corps n’est pas encore prêt à retourner à ces sports est évidemment la présence de fuites urinaires, mais il y a aussi la sensation de pesanteur au bas du ventre ou au périnée pendant l’activité. Tant que cette sensation est présente, il est important de ne pas augmenter l’intensité de l’entraînement et de poursuivre ses exercices de renforcement du plancher pelvien. Vaut mieux alors privilégier des activités causant moins de stress sur le bassin (par exemple, la marche, la marche rapide, le yoga, le pilates, la natation, le vélo, etc.).
Pour la reprise de la course, on recommande de débuter par l’alternance de marche et de course (2 ou 3 cycles d’une minute chacun, par exemple). Pour le soulèvement de charge, on commence avec des poids légers et on s’assure de contracter les muscles du plancher pelvien avant et pendant l’effort. C’est l’absence de sensation de lourdeur au périnée et l’absence de fuites qui nous guidera vers l’augmentation des charges ou du temps de course.
Évidemment, il n’est jamais agréable de se retrouver aux prises avec un problème d’incontinence urinaire. Par chance, il existe des solutions efficaces 8 qui demandent seulement un peu de temps et de volonté. Votre physiothérapeute saura vous encourager et vous guider vers le retour à la vie normale et active.
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